Le mot « deuil » dérive de « dolere » qui signifie souffrir. Il désigne la douleur ou l’affliction que l’on éprouve lors de la mort d’un proche.

« Faire son deuil » n’est autre qu’une expression prononcée comme une invitation sociétale à « passer à autre chose » et qui en dit long sur le double tabou que représentent aujourd’hui la mort et le chagrin. Or, ce processus est long et complexe, mais essentiel pour se tourner de nouveau vers la vie.

La souffrance causée par la disparition d’un être aimé se résout habituellement en passant par trois périodes : la détresse inaugurale, la dépression et l’adaptation. L’évolution se fait parfois de façon discontinue et ce processus peut se compliquer avec la prolongation exagérée de certaines phases notamment la phase dépressive. Elles se trouvent émaillées par des manifestations psychosomatiques, voire de tendances suicidaires.

Dans « Deuil et mélancolie », Sigmund Freud présente l’atténuation progressive de la douleur due à la perte d’un être cher comme l’aboutissement d’un long processus intérieur qui peut être plus ou moins long et douloureux suivant les individus. Ainsi, selon lui, après le choc de la perte et les diverses émotions qui s’ensuivent (toutes marquées par le manque d’intérêt pour le monde extérieur et par la perte de la capacité d’aimer et d’agir), le psychisme de l’endeuillé finit par se trouver comme à la croisée des chemins. Son « moi » suivra-t-il le destin de « l’objet » perdu dans la mort ou va-t-il rompre ce lien en se réinvestissant dans la vie ?

Dans une société où la rentabilité et la productivité sont la règle, le deuil et la peine doivent être résolus rapidement. Il existe une vraie injonction à « gérer son deuil », car l’endeuillé, comme le malade, dérange parce qu’il trouble la culture du plaisir et rappelle violemment ce que chacun voudrait oublier : la mort. Or, la seule manière de revenir à la vie est de se laisser aller à ses émotions et d’accepter la réalité de la perte.

Comme toutes les épreuves de la vie, le deuil est habituellement un facteur de maturation ramenant notre attention et notre intérêt sur les valeurs essentielles de l’existence et sur le sens que nous donnons à notre vie. Certaines périodes de la vie comme l’enfance, l’adolescence, la grossesse et le grand âge exposent à une plus grande fragilité. Les circonstances de la mort ont aussi leur importance lorsqu’elles sont brutales, tragiques et inhabituelles définissant les deuils traumatiques : accidents, meurtres, attentats, cataclysmes, guerres, génocides, mais aussi le suicide.

Le deuil est un lent processus d’élaboration mentale qui n’a pas de fin. En parler permet de mieux le vivre et de transformer la peine éprouvée par la perte de la personne aimée en une intériorité positive. Le deuil n’est pas une maladie, mais une épreuve de la vie que chacun traverse un jour ou l’autre au cours de son existence et qui demande le soutien des proches et des professionnels qui sont à son contact. Son déroulement et son évolution découlent essentiellement de la nature de la relation préexistante entre le patient décédé et le nouvel endeuillé. Elle explique pourquoi les membres d’une même famille réagissent différemment. Chaque cas est singulier, chacun traverse le deuil à son rythme et à sa façon.

Au sein de la maison de soins palliatifs, l’accueil des familles commence bien avant la mort, dès l’admission du malade et tout au long de son séjour qui le mènera à son terme. La famille a besoin d’attention, d’écoute, donc de temps et de disponibilité. Elle a des questions à poser et des informations à recevoir régulièrement tout au long de la maladie. Plus la mort approche et plus il convient de laisser de la place à la famille et de l’inciter à participer aux soins de nursing de ce malade en fin de vie.

Le décès d’un patient que nous avons accompagné ne met pas un terme au « contrat palliatif ». Le prolongement naturel de cet accompagnement est de permettre à la famille du patient décédé de se recueillir auprès de lui. Suivra un temps de parole et d’échange afin que chacun puisse exprimer son ressenti. Tout décès engendre une émotion insidieuse et paradoxale qui survient même si l’on n’a rien à se reprocher : la culpabilité. Survivre, c’est en effet continuer à éprouver, comme du temps de son vivant, des sentiments ambivalents. La personne en deuil se reproche de ne pas avoir assez aimé ou protégé celle ou celui qui est parti, tout en lui en voulant de l’avoir abandonnée. Elle refoule derrière sa tristesse une grande colère. Permettre la mise en mots de cette culpabilité empêche qu’elle ne soit niée ou minimisée.

Un suivi de deuil peut leur être proposé. De même que les portes de la maison demeurent grandes ouvertes à ceux qui désirent continuer à échanger avec l’équipe soignante ou pour participer à un café deuil.

Les soignants ont également besoin de pouvoir exprimer leur vécu, leurs émotions et leur chagrin au mieux dans des groupes de partage mis en place à cet effet.

Liens utiles :

http://www.spfv.fr/ecoute-info/accompagnement-du-deuil/repertoire-national

http://www.cafedeuil.fr