Titre
Cœurs ennemis
Réalisateurs – interprètes
Acteurs : Keira Knightley, Jason Clarke, Alexander Skarsgård, Kate Phillips,…
Genre : Guerre, Drame Britannique
Durée : 1 h 47 min.
Synopsis
Cœurs ennemis se passe à Hambourg en 1946. Au sortir de la guerre, Rachel rejoint son mari Lewis, officier anglais en charge de la reconstruction de la ville dévastée. En emménageant dans la nouvelle demeure, elle découvre qu’ils devront cohabiter avec les anciens propriétaires, un architecte allemand Stephan Lubert et sa fille Freda. Alors que cette promiscuité forcée avec l’ennemi révolte Rachel, la haine larvée et la méfiance laissent bientôt place chez la jeune femme à un sentiment plus troublant encore.
la critique de Vigipallia
En dehors du triangle amoureux assez conventionnel, c’est surtout une très belle histoire de deuil. En effet, Rachel et Lewis ont perdu leur fils pendant la guerre. Rachel essaie plusieurs fois d’aborder la question avec Lewis par la tristesse, le sentiment de culpabilité, la colère ou la haine. Mais Lewis, en tant qu’officier principal reste imperturbable : il est évident que s’il s’écroule, il ne sera pas capable de se relever, ce qui est impensable vu le contexte dans lequel il évolue. Ce fossé dû au deuil va, petit à petit, se creuser et pousser Rachel dans les bras de Stephan, lui aussi en plein deuil de son épouse.
On aime les silences dans ce couple endeuillé. Les reproches sous-jacents s’expriment dans le jeu des acteurs. C’est uniquement lorsque le couple fera face au deuil de l’enfant que la reconstruction sera possible. Le décor et l’époque choisis symbolisent et illustrent le deuil de ce couple : Hambourg est détruite et pleine de détresse comme eux.
La relation de deuil dans un couple est assez fidèle à la réalité : le deuil est souvent en décalage entre l’homme et la femme, le couple ressent le besoin de s’échapper dans une autre relation (généralement, il s’agit d’amitié et non d’amour). L’absurdité de perdre un enfant oblige à trouver une explication : l’absence du père protecteur, la défaillance de la mère nourricière, la haine envers l’ennemi sont, entre autres, des prétextes pour ne pas faire face à la réalité. Cette réalité de l’absence de l’enfant : l’accepter sera, pour tous les deux, leur salut.
La mise en scène est délicate malgré la violence de l’époque, l’amour sous toutes ses formes est omniprésent tout comme la haine. Les symboles sont magnifiques : la neige et le froid renvoient à la tristesse du deuil, la destruction de la ville à l’impact du deuil, la relation qui lie ces deux ennemis aux turbulences émotionnelles qu’implique le deuil. Bref, ce film est lumineux et juste dans sa façon de traiter le deuil d’un couple. Des acteurs convaincants, un contexte peu montré (l’après guerre) et un sujet délicat et intime sont autant de bonnes raisons de voir ce film.